Le budget 2025 marque un changement dans la manière dont le Canada aborde sa politique climatique

Le budget 2025 marque un changement dans la manière dont le Canada aborde sa politique climatique. Si vous suivez notre travail depuis quelques années, vous nous avez probablement entendus affirmer quelque chose comme « la politique climatique est une politique industrielle ». Décortiquons cette affirmation, car il ne s’agit pas d’un simple slogan, mais d’une reformulation complète des enjeux pour les Canadiens.

L’année dernière, plus de 2 000 milliards de dollars ont été investis dans la transition énergétique à l’échelle mondiale. La transition est en marche, et rien ne l’arrêtera. Et quoique son rythme demeure incertain, il est évident que la compétitivité en est un impératif incontournable. Qu’est-ce que cela signifie ? Alors que le monde s’oriente vers un nouvel ensemble de technologies et de systèmes énergétiques, nous devons développer la capacité industrielle nécessaire à la transition, sans quoi nous deviendrons de simples acheteurs passifs. C’est aussi simple que cela.

Ce qui compte, ce n’est évidemment pas de se fixer une série d’objectifs abstraits en matière de réduction des émissions. La compétitivité climatique consiste à s’assurer une place de choix dans les chaînes de valeur mondiales qui se développent en lien avec les technologies propres.

Cela implique : une chaîne d’approvisionnement solide pour les batteries et les véhicules électriques, avec des liens en amont remontant jusqu’aux mines ; une énergie propre, abondante et abordable, accessible comme intrant à toutes les industries ; une chaîne d’approvisionnement du bois massif allant jusqu’à à la préfabrication, pour favoriser la croissance des entreprises locales ; une résilience géopolitique accrue grâce à des investissements dans les minéraux critiques et dans notre base manufacturière à double usage.

L’avantage du Canada résidera dans la maîtrise des électrotechnologies de demain, à la fois pour alimenter notre économie intérieure et pour exporter des solutions à l’étranger. Il faut arrimer notre politique climatique à la productivité et à la compétitivité. Les investissements dans l’énergie propre, l’industrie manufacturière et la formation professionnelle sont non seulement écologiques, ils contribuent à la construction de la nation.

Ce budget est prometteur pour plusieurs raisons. D’une part, il soutient l’expertise canadienne en matière de minerais et renforce la base manufacturière du pays. D’autre part, il vise à rétablir la relation entre la science, la technologie et la commercialisation de solutions locales dans des domaines clés tels que la défense.

Les bases d’une politique industrielle forte sont déjà en place, avec des incitatifs à l’échelle de l’économie entière pour favoriser la productivité et l’innovation, combinées à des interventions ciblées pour soutenir la souveraineté et la diversification commerciale.

Comme l’a déclaré Sahir Khan, vice-président directeur de l’Institute of Fiscal Studies and Democracy, à la CBC : à l’heure actuelle, « tous les pays du G7 échangeraient volontiers leur position avec le Canada » étant donné sa marge de manœuvre budgétaire, ses ressources abondantes et sa base industrielle. Ce budget est l’occasion de tirer parti de ces avantages dès maintenant, puis d’investir encore plus dans les domaines les plus fructueux.

Mais une action ciblée et coordonnée sera nécessaire pour aligner le travail des nouveaux organismes – Maisons Canada, l’Agence d’investissement pour la défense, le Bureau des grands projets et le Fonds souverain des minéraux critiques – sur les actifs stratégiques existants, en particulier le Fonds de croissance du Canada, la Banque de l’infrastructure du Canada et Exportation et développement Canada

La Stratégie de compétitivité climatique, la Stratégie industrielle de défense, la Stratégie nationale sur logement et la Stratégie de diversification du commerce – sans oublier la stratégie relative aux véhicules électriques, qui n’a pas été entièrement abordée dans le budget et qui devrait être dévoilée d’ici un mois – sont toutes interconnectées. Mais avec des stratégies provenant de plusieurs sources et des moyens de mise en œuvre encore plus nombreux, le défi sera d’obtenir un résultat supérieur à la somme de ses parties.

La base est solide et l’ambition est réelle. Le Canada dispose d’une capacité fiscale, d’une abondance de ressources et d’une base industrielle que la plupart des pays ne peuvent qu’envier. Les outils fournis par ce budget – des crédits d’impôt élargis, des fonds pour les minéraux essentiels, une trajectoire de tarification du carbone à long terme – nous permettrons d’être compétitifs et de réussir dans l’économie propre.

À présent, tout dépend de l’exécution. Si nous parvenons à harmoniser ces stratégies de manière efficace et à agir de manière décisive sur les grands projets, le Canada ne se contentera pas de participer à la transition énergétique mondiale, il contribuera à la mener, en assurant prospérité et résilience pour les générations à venir.

Moe Kabbara est le président de l’Accélérateur de transition.

Bentley Allan est le vice-président de l’économie du futur de l’Accélérateur de transition. Il est professeur associé de sciences politiques à l’université Johns Hopkins.

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